Le secteur textile et habillement est l’un des secteurs qui ont connu de grandes difficultés durant les sept dernières années, étant un secteur exportateur par excellence et un grand employeur de main-d’œuvre. Une situation qui lui a coûté la fermeture de centaines d’entreprises et la perte de milliers d’emplois. Mais disons que les entreprises opérant sur le marché local ont aussi souffert de la précarité d’une situation où l’absence de contrôle technique des importations, de la multiplication des franchises internationales et la prolifération de la contrebande de vêtements ont constitué un défi de plus pour permettre aux fabricants tunisiens de mieux se positionner sur le marché intérieur et améliorer leur compétitivité.
La reprise de l’export est certaine pour le secteur textile et habillement. Une bonne nouvelle si on sait l’impact qu’ont eu les perturbations sécuritaires sur les commandes des donneurs d’ordre européens, enregistrant des baisses importantes ces dernières années et impactant la performance des fabricants tunisiens sur le marché européen, principal marché à l’export. “La Tunisie a confirmé l’embellie et le réveil observé en 2017. Au premier semestre, une progression de 23% en dinars et plus de 4% en devise a été enregistrée. Nous n’avons pas vu cela depuis quelques années”, a affirmé Nejib Karafi, directeur général de la Fédération tunisienne du textile et habillement (Ftth).
Il a ajouté que la Tunisie est le seul pays qui ait enregistré, cette année, un progrès parmi les dix principaux fournisseurs de l’Union européenne. Sa part sur ce marché a fortement régressé atteignant 2,2% dans la période d’après — 14 Janvier 2011 contre 4% auparavant. Mais il paraît qu’elle commence à reprendre sa place avec 2,7% enregistrés cette année. Une progression qui aura certainement des incidences sur la performance de ce secteur stratégique pour les exportations et l’industrie tunisienne. Rien que l’impact sur l’emploi, puisque 1% de croissance de plus sur le marché européen équivaut à 60 mille emplois de plus, nous apprend M. Karafi, indiquant qu’actuellement les besoins en main-d’œuvre dans ce secteur sont estimés entre 10 mille à 15 mille emplois par an.
Difficultés sur le marché local Mais si le marché à l’export connaît des améliorations, le marché local traverse des difficultés énormes et persistantes. Une situation qui a provoqué une mobilisation accrue de la Ftth depuis sa création, alertant quant au danger persistant sur les entreprises tunisiennes opérant sur ce marché et les milliers d’emplois qu’elles procurent. “Nous commençons à avoir des enseignes tunisiennes qui peuvent offrir un produit ayant une qualité comparable aux exportations à des prix raisonnables. Nous voulons préserver cela et les soutenir davantage”, a indiqué M. Karafi.
En début juin 2017, des mesures exceptionnelles ont été prises lors d’un Conseil ministériel restreint au profit du secteur afin de pallier les difficultés financières dont souffrent un grand nombre d’entreprises. Certaines mesures ont été appliquées, comme le rééchelonnement des dettes fiscales. Mais celles relatives à la formation professionnelle et à la prise en charge des cotisations patronales des entreprises implantées dans les zones défavorisées sont encore en stand-by. La dernière mesure devrait être incluse dans la loi de finances 2018, mais il n’en est rien. Le ministère des Finances a promis qu’elle serait intégrée dans la loi de finances 2019.
M. Karafi a souligné que cela a été évoqué lors d’une réunion le 7 août 2018 de la Commission ministérielle économique entre la délégation de l’Utica, et les ministres des Finances, de l’Industrie et des PME, du Commerce, de la Formation professionnelle et de l’mploi, de l’Environnement et des Affaires sociales ainsi que le directeur général des douanes et les directeurs généraux chargés respectivement des deux secteurs au sein du ministère de l’Industrie et des PME.
Mobilisation de la FTTH La Ftth a appelé, ainsi, à l’application dans les meilleurs délais de la mesure visant à accorder la priorité aux entreprises tunisiennes dans le cadre des marchés publics d’approvisionnement en produits textile, d’habillement, de cuir et chaussures. De même, il s’agit d’améliorer davantage les services logistiques et, notamment, les opérations sur le Port de Radès et de faciliter les procédures dans le processus d’exportation des produits du textile et d’habillement tunisiens.
Suite à cette réunion, la Fédération a tenu part à une seconde rencontre, le 14 août 2018, avec le ministère du Commerce, consacrée à discuter les propositions de la Ftth en ce qui concerne le marché local. En fait, les industriels dénoncent une concurrence déloyale, qui octroie aux importateurs une longueur d’avance. Alors que les fabricants tunisiens sont soumis à un contrôle technique régulier, les importateurs ne sont soumis à aucun contrôle à l’entrée. Il leur suffit de payer les 30% des droits de douane et faire passer leur marchandise.
“Ils peuvent déclarer n’importe quelle valeur des produits importés, sans aucune possibilité de vérification de la part des agents de douane qui disent qu’ils ne sont pas habilités à cela. Nous avons proposé d’instaurer les valeurs tendance, en concordance avec les règles de l’Organisation mondiale du commerce (OMC), en prenant en compte les derniers prix pratiqués. Ainsi, chaque importateur sera prié de donner des justificatifs ou de recourir à une expertise s’il présente une valeur au-dessous de la moyenne”, a précisé M. Karafi.
Favoriser les marques locales En outre, la Fédération a appelé à favoriser les marques locales dans les nouveaux espaces commerciaux créés, appelant à leur octroyer les mêmes conditions que les enseignes étrangères. “Dans d’autres pays comme la Turquie, 20% des meilleurs espaces sont accordés aux marques locales. D’autant plus que ces enseignes doivent créer des fonds de commerce alors que les étrangères payent seulement la location”, a estimé le DG de la Ftth.
La friperie constitue aussi un défi de plus pour ces enseignes. D’où l’appel à rationaliser cette activité en appliquant la loi qui la régit.
M. Karafi a précisé que la friperie a perdu sa vocation sociale pour soutenir les catégories défavorisées. Egalement, il s’agit de plus en plus d’une importation des fins de séries et autres produits de braderie. La Ftth a appelé ainsi, à rationaliser les quantités d’importation de friperie en corrélant les volumes d’importation à ceux qui sont reconditionnés et réexportés par les opérateurs. De même, on a appelé à faciliter l’écoulement de 30% de la marchandise des entreprises totalement exportatrices. Une mesure qui existe, mais qui est difficilement appliquée, vu la complexité des procédures. Ce qui permettrait d’améliorer l’offre en produits locaux.
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